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  • Silver Letters 2 : le papier argentique

    Ainsi, en ce jour d'automne, alors que se referme la terre

    Noire, nous serions à jamais seuls à connaître cet ignoble

    Passé. Nous serions à jamais seuls à savoir ce que criait

    Ton regard noir d'enfant capturé sur le papier argentique.

     

    Ainsi, jusqu'à mon ultime départ, il continuerait donc à hanter

    Mes nuits, ce regard. Ce regard que je n'ai su déchiffrer.

    Ce regard qui, dans une lutte sourde inégale, affrontait

    Celui du photographe, ce voleur de ton enfance murée

    Dans le silence. Ce photographe qui dérobait la blondeur

    De tes boucles d'enfant, et sur la pellicule, jouissait

    De ta souffrance muette, je voudrais que jamais

    Il n'eut d'existence. Ce photographe qui avait déjà scellé

    Notre destin.

     

    Ainsi, en ce jour d'automne, alors que tous ceux qui auraient dû

    Te protéger sont désormais à l'abri de cette terre noire, tu serais

    A jamais seule à vivre avec cette béance infinie, à sourire

    A ceux qui t'entourent et ignorent tout de tes blessures

    Parce que tu as choisi le silence.

     

    Ainsi, en cette terre, je serais seul à connaître un fragment

    Infime de ta vérité, à porter, selon la promesse exigée,

    Le fardeau du secret.

     

    Parfois, je voudrais t'en vouloir de cette confidence échappée

    Des décennies après. Mais, comment le pourrais-je ? Moi

    Qui n'ai pas su fermer les portes aux fantômes qui te terrorisaient

    Le soir dans la chambre nuptiale. Seule me dévore encore

    Une colère infinie envers lui que la terre protège. Je voudrais

    Oser briser la stèle érigée en son souvenir, la réduire en infime

    Poussière grise et terne, broyer ses os, misérables vestiges,

    Et les voir se dissoudre dans les eaux sombres du fleuve

    Qui gronde, pour que rien de lui ne demeure sur cette terre.

    Je voudrais crier à tous ceux qui, dupés, l'ont aimé,

    Au monde entier, quel monstre il était.

     

    En ce jour d'automne, alors que se referme la terre, je pense

    A toi, lointaine sihouette muette errant dans les landes sombres

    De ton enfance dévastée.

    En ce jour d'automne, alors que se referme la terre, je ne désire

    Que le bleu du ciel, limpide, et qu'un jour, tu choisisses de parler

    Pour être enfin apaisée.

  • Song of the Day : "À ceux qui viendront après nous" by MINA SANG

    Le froid m'a saisi au lever du jour. Dans les rues encore obscures, quelques silhouettes masquées, emmitouflées. Au retour, le plaisir du tabac mêlé au goût du café noir. Le ciel est d'un bleu éclatant. Presque trop beau de limpidité. J'écoute le poème de Bertolt Brecht "À ceux qui viendront après nous" écrit en 1939 lors de son exil. Mis en musique et interprété par MINA SANG.