En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.
Gravée dans ma mémoire, une vieille compagne parfois oubliée mais vers qui je reviens toujours.
Trop connue, trop de succès, trop de versions mais pourtant un morceau de mon enfance, entendue à la radio, en mono, et cela lui allait tellement bien.
En 1966, il n'y avait pas la télé chez moi, les chansons s'écoutaient à la radio, sur un tourne-disques ou bien dans les bals et les fêtes du samedi.
Le rythme, la guitare et la voix de Nancy Sinatra, si reconnaissable. Ça vous donnait envie de danser et pour moi, si jeune à l'époque, de bouger, de sautiller.
Je ne comprenais rien au texte mais c'était associé à la joie de vivre, un instant gai et insouciant.
C'était les années soixante, ma mère m'obligeait à mettre des culottes courtes aux beaux jours et il y avait encore la tradition du « pantalon du dimanche ».
Bien plus tard, je découvris la silhouette de celle qui avait dû orner en poster pas mal de cabines de camionneurs et qui chantait :
« These boots are made for walking, and that's just what they'll do One of these days these boots are gonna walk all over you »
Et puis surtout, indissociable, Lee Hazlewood, quasiment oublié pendant des années, et qui connaîtra les louanges de la critique avec ce qui fut son dernier album « Cake or Death » sans compter les articles élogieux à son décès, y compris de journaux qui, des années plus tôt, l'avaient étrillé.
Ces qualificatifs, je crois les avoir déjà employés pour caractériser comment l’œuvre de Cheval Blanc - même si leur style n'est pas comparable - peut être reçue.
Je pense que l'expérience est de la même nature à l'écoute des chansons de Clara Engel, jeune artiste indépendante mais déjà auteure d'une dizaine d'albums depuis 10 ans.
J'avais déjà grappillé ça et là dans ses productions, troublé non seulement par son chant mais aussi par l'une de ses pochettes (celle d'Ashes & Tangerine).
En fait, ce portrait me semble représentatif de ce qui émane du travail de Clara Engel : une beauté qui refuse les effets faciles de la séduction, une œuvre qui refuse les concessions, une fragilité sombre douée d'une force née au plus profond.
Ici, il n'y a pas de place pour les artifices de la facilité.
Non, Clara Engel trace sa route singulière, une voie où la sensibilité règne, une voie où un rock profond et lyrique rôde, une voie où la tension nous prend littéralement au corps au détour d'une phrase musicale.
Et parce que le monde n'est pas que ce que nous percevons,
et parce que nous ne sommes jamais ce que nous montrons,
la dissonance qu'instille Clara Engel dans nombre de ses compositions est, me semble-t-il, une pièce maîtresse de son travail artistique.
Nous ne sommes jamais loin de la perte de l'équilibre, de la brisure, de la rupture.
C'est sans doute l'une des grandes réussites de Clara Engel que de nous emmener au point de bascule : là où les apparences deviennent des incertitudes, là où l'horizon devient soudainement trouble.
Exercice délicat parce qu'à nous placer au bord du gouffre, l'inconfort nous guette.
Mais la force de son chant, la profondeur et la puissance qui en émanent, la poésie incandescente de certains de ses textes, l'énergie viscérale de ses compositions sont là pour nous aider à poursuivre ce chemin unique en sa compagnie :
« I lift a latch and I step into a glittering sky I found a trapdoor in this wretched night an amethyst eye in the void »
Seules trois chansons de son dernier album « Looking-Glass Fire » réalisé en juin 2014 sont actuellement en écoute sur sa page bandcamp dont la superbe « My Beloved's Pulse » dont j'ai cité un extrait :
Profitez-en pour découvrir ses précédents albums. Voici une trop courte sélection de quelques-uns de mes titres préférés qui vous permettront, je l'espère, de découvrir l'étendue du talent de Clara Engel.
Tout d'abord, deux chansons magnifiques extraites de très bel album "The Bethlehem Tapes" paru en 2010 :
"Song to the Sea Witch (Disembody My Voice)", titre flamboyant extrait de l'album The Lovebird's Throat réalisé en 2012 :
"Tangerines" de l'excellent opus "Ashes &Tangerines" paru en 2014 :
"Blind me" qui figurait dans "Secret Beasts" réalisé en 2009 :
"Whip Dance" de son album éponyme paru en 2006 :
"Cousin Mary" et ses choeurs, présente sur l'EP du même nom en 2006 :
Par hasard, je clique sur un lien et là, comment dire, je me frotte les oreilles de plaisir !
Ava Antico mais qui est-ce ? J'avais hésité en voyant ce nom, un groupe ou une chanteuse style tango remis au goût du jour ou bien des fans de musique latino, style musique du monde !
Mais non, rien de tout ça.
Ava Antico vous délivre une chanson où le rock rôde pour finir par exploser. Avec une fulgurance, une énergie brute qui s'empare de votre corps, une poésie qui jaillit, une économie de moyens (violon, guitare et voix) qui emplit l'espace de vos nuits. Alchimie parfaite entre cette voix légèrement voilée qui se fait chaude pour mieux vous emporter, ces cordes rageuses qui se montrent implacables et cette guitare qui, de discrète, devient mordante.
Ava Antico est un trio à découvrir sans attendre.
Ava Antico est composé de : Carine Joe (chant), Gaëlle Deblonde (violon) et JC Vivron (guitare).
Vous pourrez écouter et acheter quatre titres sur leur page bandcamp.
Ce n'est qu'une démo mais elle est déjà porteuse d'un univers. Je n'ai que peu d'informations sur ce groupe. Ils se produisent sur scène depuis quelques mois dans une configuration à 4 : John à la guitare, Éléonore aux claviers et aux chœurs, Rémi au chant et à la guitare, Frédéric à la basse. Je n'ai pas eu encore le plaisir de les écouter en live mais je pense que leurs chansons doivent y prendre une toute autre saveur.
Plusieurs auteurs et compositeurs qu'ils citent font partie de ceux qui m'accompagnent parfois depuis longtemps : Holden, Nina Simone, Dick Annegarn et bien d'autres.
Sans être partisan d'une préférence pour une langue particulière, il m'est agréable d'entendre des jeunes artistes qui se frottent à la langue française, qui s'en emparent et prouvent qu'elle est une langue musicale, une langue de la sonorité, une langue dont la palette est étendue. Au risque bien sûr de se priver d'une audience plus large et de connaître une diffusion restreinte.
On pourra découvrir de nombreux titres en démo sur leur page soundcloud. La dansante "A ton chat" ou la délicate "Ainsi vont les larmes" pourraient vous réserver de jolis moments. Un groupe à suivre.
"Palomar" est un autre petit bijou offert par Italo Calvino dont j'ai décidé cet été d'évoquer quelques publications. Ce livre composé de 27 textes, structuré en 3 parties (Les vacances de Palomar, Palomar en ville, Les silences de Palomar) est un régal. Une écriture des plus précises, à la fois d'une grande simplicité et extrêmement travaillée. Un humour qui masque parfois le désespoir. Un ouvrage sur le regard, sur le rapport entre un fragment de réalité perçu par ce personnage et sa conscience.
"A la suite d’une série de mésaventures qui ne méritent pas d’être rappelées, monsieur Palomar avait décidé que sa principale activité serait de regarder les choses du dehors."
Livre philosophique mais d'une grande facilité d'accès, Palomar comporte des textes parfois d'à peine trois pages mais qui valent bien plus par leur qualité littéraire et leur portée que plusieurs dizaines de romans.
La verve, l'ironie et l'humour ne sont pas absents de ces textes. Ainsi, "Le sein nu" vous entraînera aux côtés de Palomar sur une plage où une jeune femme prend le soleil les seins nus. Je ne vous dévoilerai pas le titre du dernier texte mais ne peux résister à en citer un court extrait :
"Si le temps doit finir, on peut le décrire, instant après instant, pense Palomar, et chaque instant, quand on le décrit, se dilate à tel point qu'on n'en voit plus la fin."
Pour de sombres raisons de droits, les livres d'Italo Calvino ne sont actuellement pas tous disponibles en commande dans une traduction française. Ils sont de nouveau publiés progressivement chez Gallimard. En attendant, on peut trouver des versions d’occasion ou se rendre en bibliothèque.