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My Favourite Albums

  • Album of the Month : "Un nid" by Marcel Kanche

    La pluie détrempe la terre. Le vent épouse l'ardoise, fait vaciller la charpente plus que centenaire. Je me terre. Je me terre dans mon antre de granit et de bois. Le ciel est de la couleur des cendres. Je rêve d'une plage dorée où s'étendre et rêver. La mer, à quelques encablures, dévoile ses crocs blancs. Novembre et ses ombres me taraudent. Novembre et ses décombres me font douter. Douter de l'humanité. Arracher la mousse, le lierre et l'écorce. Fouiller le sombre, ronger le cœur, écouter la voix des ombres. De douleur, la mémoire vouloir dissoudre et ne pas pouvoir.

    La pluie fait chanter le verre. Dans la pénombre, j'écoute le dernier opus de Marcel Kanche. Les mots et les notes sont sa matière. Le soc qui fouille la terre, le burin qui creuse la matrice. J'écoute son chant, sa voix, sa musique et ses textes qui m'emportent en des contrées précieuses, inestimables, indispensables. 

    La pluie continue de balayer la venelle. Je reste là, dans la pénombre, je reste là, vivant sur terre, avec ces dix titres.

    De "J'aurais pu" à "Sur terre", un voyage aux émotions indescriptibles. Outre les siens, des textes de Gildas Veneau (superbe "Broyant la lumière"), de Bertrand Belin ("Figure") et de Virginie Despentes ("Un passage"). Des textes comme une évidence dans l'univers de Marcel Kanche. Des compositions que je n'ai pas envie d'analyser tant je veux me laisser vagabonder. Remarquables aussi. L'écoute attentive de "Maison brulée" par exemple, démontre, si cela était nécessaire, que la musique et les mots forment un tout indissociable dans son oeuvre. 

    Je reste là, avec ce qui fait notre humanité, des cendres et de la glaise, les fantômes du passé et le vent d'été, le rire des enfants qui jouent et le vin partagé avec ceux qui sont des amis, les espoirs déçus et la main aimée, embrassée chaque soir avant que le sommeil l'emporte.  

    Je reste là, dans la pénombre. Un chant somptueux résonne encore dans l'espace. Je crois que la pluie vient de cesser. 

     

  • My Album of this Summer : "[e​.​pok]" by IGNATUS

    L'été s'étire, le soleil inonde la baie, je me terre à l'abri des murs de granit. Je réécoute une fois encore un album qui ne m'a pas quitté ces deux derniers mois. Je l'avais oublié dans la multitude de ces satanés fichiers numériques...

    Paru en 2017 chez La Souterraine et alors ! Il n'est jamais trop tard pour signaler un opus à la troublante beauté, un album qui se tient, aux compositions et textes qui vous emportent irrémédiablement, à l'interprétation vocale d'une grande justesse.

    "[e​.​pok]" est de ces  chefs-d'oeuvre qui deviennent des compagnons dont on ne peut se passer, de ceux dont l'écoute répétée permet de découvrir la richesse multiple et le travail d'orfèvre réalisé, de ceux dont l'écoute répétée ne parvient jamais à en épuiser la subtilité des images générées, des sens et des textures.

    Il serait presque tentant d'isoler quelques titres tant ils sont remarquables ("Le détroit de Bering", "Dans l'eau") mais, en fait, j'écoute à chaque fois cet album dans sa continuité. Les neuf titres qui le composent gagnent, selon moi, à être écoutés les uns par rapport aux autres. L'enchaînement des ambiances musicales et des textes est tellement juste qu'il m'est quasiment impossible d'interrompre l'écoute. Si l'écriture des chansons d'IGNATUS est remarquable, sa façon de poser sa voix et la richesse des compositions le sont tout autant. Nicolas Losson, Hervé Le Dorlot et Michel Schick y ont apporté leur touche avec brio.

    A (re)découvrir absolument.

    Indispensable.

     

  • My Favorite Albums : Syd Matters

    Réédition en vinyle des deux albums de Syd Matters "A Whisper And A Sigh" et "Someday We Will Foresee Obstacles" à l'occasion du 20e anniversaire du label Third Side Records. 

  • LP of the Month : "Chante-Nuit" by Facteurs Chevaux

    Cette semaine, avec un sourire, une employée de La Poste m'a déposé à distance un paquet qui recélait un trésor à contre-courant des modes : le nouvel opus de Facteurs Chevaux, tant attendu, était enfin là.

    Conquis par l'écoute de leur premier album "La maison sous les eaux", j'avais été définitivement envoûté en assistant à l'un de leurs concerts. Leur prestation sur scène n"avait fait que confirmer la complicité de ce duo et l'intensité remarquable de leur premier LP. Je crois qu'ils avaient, ce soir-là, surpris une bonne partie des spectateurs qui ne les connaissaient pas ou que très peu.

    Il est parfois difficile après un premier livre ou album particulièrement enchanteur de réussir à provoquer le même effet. Facteurs Chevaux a pris son temps. Tels des artisans qui consacrent sans compter les heures à créer une pièce, un chef d'oeuvre, ce duo est un polisseur de mots, de voix, d'ambiances et de mélodies. A contre-courant des modes, ai-je écrit d'emblée. C'est aussi cela qui distingue cet album. Bien que les influences existent dans la recherche de cette pureté des harmonies et du chant (aux effets quasiment religieux), de cette écriture ciselée, Facteurs Chevaux trace une voix singulière dans le paysage musical actuel.

    Classé par certains dans le folk, je ne suis pas certain qu'il convienne de les y assigner. Leur oeuvre est de l'ordre de l'intemporel. Elle aurait pu être entendue, il y a des siècles, dans une chapelle perdue dans quelque val ; elle aurait pu résonner dans des salles aux voûtes de pierre, se déployer au coeur de sombres et mystérieuse forêts. Elle peut résonner dans des espaces de béton et d'acier emplis de centaines de spectateurs, s'emparer de nous qui vivons dans un monde de bruit et de vitesse.

    Par la réunion de chacune de leur sensibilité, Fabien Guidollet et Sammy Decoster créent un ailleurs qui dépasse la somme de leur individualité artistique. Une alchimie envoûtante. Un nouvel espace s'ouvre où les chansons se déploient, épurées. Dans ce que l'on pourrait interpréter comme la recherche d'une pureté, d'une sobriété, d'un absolu au service des seules harmonies vocales et des textes, une oeuvre se déploie remarquablement intense. Il n'y a pas de tricherie dans cet opus, pas d'artifice pour aguicher l'auditeur, la prise de risque y est maximale. Tels des tailleurs de pierre, des sculpteurs de marbre, nul retour en arrière possible. A la recherche de leur "palais idéal", créant une oeuvre musicale et chantée qui pourrait nous accompagner vers le "tombeau du silence et du repos sans fin", Facteurs Chevaux nous ensorcelle définitivement.

    "Chante-Nuit", Edition Vinyle, 2020. Avec une peinture de Noémie Boullier pour la pochette. Disponible sur Bandcamp.

    Deux titres pour partir à la découverte : "Chante-Nuit" (qui donne son titre à l'album) et "Firmament", purs moments d'harmonie vocale et textes ciselés.