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Album Review - Page 17

  • Discovery : Aldous Harding debut album review

    Dans la douce fraîcheur de cette nuit d'été, le casque sur les oreilles, je me laisse porter par le chant d'Aldous Harding.

    Il y a quelques mois, cette jeune artiste (Hannah Harding) a signé un premier album éponyme en Nouvelle-Zélande. Je n'ai pas pu encore me procurer le vinyl mais je dispose d'une version digitale composée de neuf titres. Ce qui est le plus frappant dans ce premier album, ce qui m'a le plus captivé est la capacité d'Aldous Harding de changer d'ambiance, de moduler son chant et son interprétation selon les chansons qu'elle propose. De "Hunter" de facture folk assez classique à des titres chargés d'émotion, d'intensité (No Peace, Stop You Tears, Small Bones of Courage, Titus Alone, Titus Groan), elle montre déjà une maturité étonnante.

    Je ne peux que vous encourager à partir à la découverte de cet album. Bien entendu, il faut accepter d'entrer dans des chansons au format peu habituel et commercial qui durent pour 7 d'entre elles plus de 5 min.

    A ma connaissance, l'album n'est distribué qu'en Nouvelle-Zélande et en Australie.

  • Album of the Month : Mirel Wagner, « When The Cellar Children See The Light Of Day »

    J'attendais avec quelque appréhension la parution de son second album depuis que sa sortie avait été annoncée chez Sub Pop. L'auteure-compositrice-interprète allait-elle modifier son style ? Serait-elle capable d'égaler la qualité atteinte dès sa première réalisation ? Allait-elle nous dérouter, nous surprendre en explorant d'autres chemins ?

    La réponse commença à s'esquisser lorsque son nouveau label dévoila « Oak Tree » puis « The Dirt ».

    Au passage, une digression pour dire mon irritation sur cette stratégie devenue quasi-systématique et loin d'être nouvelle, qui consiste à annoncer un album morceau par morceau bien avant sa sortie. Je sais bien que, dans ce monde, la musique n'échappe pas aux règles du marché, bien culturel certes mais aussi bien marchand. Mais enfin, rien de plus désagréable parfois que de découvrir ce qui devrait former un tout, ce qui devrait relever d'un projet d'ensemble, de façon fragmentée.

    Le second album de Mirel Wagner ne marque, selon moi, aucune rupture importante. Les changements les plus nets semblent résider dans les choix effectués en studio qui donnent peut-être un son plus net, un chant plus direct, plus clair, avec, assez rarement, l'apport en arrière-plan de voix et de quelques instruments.

    Les articles élogieux vont fleurir - ils commencent déjà. La critique spécialisée a besoin de s'emparer d'artistes et de nous offrir, avides consommateurs que nous sommes, de la nouveauté : le nouveau Nick Cave, la nouvelle PJ Harvey... Je n'y échappe pas non plus d'ailleurs dans ce blog. Dès son premier disque, les comparaisons avec d'illustres prédécesseurs tel Léonard Cohen ont fleuri. Je ne suis pas certain de leur intérêt même si l'on sait que rien ne s'écrit sans avoir été nourri par ce que d'autres ont écrit.

    En dix titres, Mirel Wagner continue de nous livrer un univers sombre, dépouillé, grave mais toujours aérien. La guitare est toujours omniprésente, des cordes apparaissent quelquefois, son phrasé et sa voix sont toujours au service de textes sans jamais tomber dans l'excès.

    Pas de fioritures en ces terres.

    C'est peut-être ce qui est le plus troublant, le plus attirant, ce qui constitue la plus grande qualité de Mirel Wagner : l'austérité, la sobriété, le caractère spartiate, monacal de ses compositions et de son chant et en même temps, la capacité à chanter les textes les sombres de façon lumineuse. On sent qu'elle aurait les capacités vocales pour laisser éclater son chant mais cette retenue lui permet de trouver la justesse appropriée dans son interprétation, de créer une intensité remarquable avec une économie de moyens.

    Isoler certaines des dix chansons serait peut-être injuste tellement elles forment un tout d'une grande cohérence. Pourtant, je ne peux résister à mentionner certaines d'entre elles qui m'ont particulièrement touché :

    • « The Dirt » avec ses accords plaqués puis ces quelques notes (jouées en slide?) posées simplement, quasi déchirantes, et ses paroles « Mama, Don't cry, You can't eat the dirt » :

    • la superbe « What Love Looks Like » avec cette question qui revient «  Is this what love looks like ? » et où Mirel Wagner par son phrasé exceptionnel et cette composition minimaliste basée sur quelques notes parvient à créer une intensité remarquable ;

    • « Goodnight », telle une berceuse tendre et rassurante qui s'achève avec « Tomorrow will be all right, Together forever », accompagnée en arrière-plan de quelques discrètes notes de piano et de violoncelle ;

    • mais comment oublier celle qui ouvre l'opus et qui égrène comme une comptine enfantine chantée 1 2 3 4, ou bien les non moins réussies « In My Father's House », « Dreamt of a Wave », « The Devil's Tongue » et « Taller Than Tall Trees », « Ellipsis » et ses cordes discrètes, « Oak Tree » qui s'achève par un dernier « sweet dreams ».

    Mirel Wagner ne fait pas dans la profusion, l'apparat inutile. Elle trace une voie obsédante et lumineuse au milieu du bruit de ce monde. Elle instaure presque un silence vertigineux, un espace où chaque note, chaque parole compte dans ce monde saturé. Mirel Wagner n'a guère besoin d'artifices parce qu'elle puise au plus profond de ce qui nous traverse et nous l'offre à écouter, nous le révèle. Et c'est cela qui donne une rare épaisseur, une densité extrême à l'ensemble de ses chansons. Que cela se poursuive longtemps.

    P.S. : Je tenais à souligner combien je suis redevable à Sabine, amatrice passionnée du blog musical WMIMM, malheureusement en sommeil depuis de longs mois, d'avoir attiré mon attention sur le premier opus éponyme de Mirel Wagner lors de sa sortie. On pourra lire ici la chronique élogieuse qu'elle écrivit, conquise par cette entrée magistrale de cette jeune artiste qui nous vient de Finlande.

  • Review : Clara Engel, une artiste sans concessions

    Radicale, de l'ordre du tout ou rien.

    Ces qualificatifs, je crois les avoir déjà employés pour caractériser comment l’œuvre de Cheval Blanc - même si leur style n'est pas comparable - peut être reçue.

    Je pense que l'expérience est de la même nature à l'écoute des chansons de Clara Engel, jeune artiste indépendante mais déjà auteure d'une dizaine d'albums depuis 10 ans.

    J'avais déjà grappillé ça et là dans ses productions, troublé non seulement par son chant mais aussi par l'une de ses pochettes (celle d'Ashes & Tangerine).

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    En fait, ce portrait me semble représentatif de ce qui émane du travail de Clara Engel : une beauté qui refuse les effets faciles de la séduction, une œuvre qui refuse les concessions, une fragilité sombre douée d'une force née au plus profond.

    Ici, il n'y a pas de place pour les artifices de la facilité.

    Non, Clara Engel trace sa route singulière, une voie où la sensibilité règne, une voie où un rock profond et lyrique rôde, une voie où la tension nous prend littéralement au corps au détour d'une phrase musicale.

    Et parce que le monde n'est pas que ce que nous percevons,

    et parce que nous ne sommes jamais ce que nous montrons,

    la dissonance qu'instille Clara Engel dans nombre de ses compositions est, me semble-t-il, une pièce maîtresse de son travail artistique.

    Nous ne sommes jamais loin de la perte de l'équilibre, de la brisure, de la rupture.

    C'est sans doute l'une des grandes réussites de Clara Engel que de nous emmener au point de bascule : là où les apparences deviennent des incertitudes, là où l'horizon devient soudainement trouble.

    Exercice délicat parce qu'à nous placer au bord du gouffre, l'inconfort nous guette.

    Mais la force de son chant, la profondeur et la puissance qui en émanent, la poésie incandescente de certains de ses textes, l'énergie viscérale de ses compositions sont là pour nous aider à poursuivre ce chemin unique en sa compagnie :

    « I lift a latch
    and I step into a glittering sky
    I found a trapdoor in this wretched night
    an amethyst eye
    in the void »

    Seules trois chansons de son dernier album « Looking​-​Glass Fire » réalisé en juin 2014 sont actuellement en écoute sur sa page bandcamp dont la superbe « My Beloved's Pulse » dont j'ai cité un extrait :

    Profitez-en pour découvrir ses précédents albums. Voici une trop courte sélection de quelques-uns de mes titres préférés qui vous permettront, je l'espère, de découvrir l'étendue du talent de Clara Engel.

    Tout d'abord, deux chansons magnifiques extraites de très bel album "The Bethlehem Tapes" paru en 2010 :

     

    "Song to the Sea Witch (Disembody My Voice)", titre flamboyant extrait de l'album The Lovebird's Throat réalisé en 2012 :

    "Tangerines" de l'excellent opus "Ashes &Tangerines" paru en 2014 :

     "Blind me" qui figurait dans "Secret Beasts" réalisé en 2009 :

    "Whip Dance" de son album éponyme paru en 2006 :

     "Cousin Mary" et ses choeurs, présente sur l'EP du même nom en 2006 :

  • Song of the Week & Review : "Un secret" by Forêt

    Je crois que je ne vous ai pas encore parlé ici de ce duo de Montréal. Alors, il est temps de vous le faire découvrir avec leur toute dernière chanson "Un secret" qui annonce leur futur opus qui sera le second.

    Forêt qui réunit Émilie Laforest et Joseph Marchand, a sorti un premier album éponyme en 2013 avec de très beaux textes écrits par Kim Doré et des compositions délicates du duo. C'est un album qu'il faut prendre le temps de découvrir. Écouter un peu puis y revenir doucement, se laisser porter par les paroles et les harmonies.

    Parmi mes préférées, la magnifique "L'amour de marbre", la somptueuse "Le sucre de mes larmes", la tendre "Repose-toi bien (pour Thomas)"

  • Free Download : "At The Gates Of Central Bank" by Prince Of Assyria

    Un téléchargement gratuit à ne pas rater, offert par le label finlandais pour son 3e anniversaire. Une compilation de 8 titres est disponible.

    Profitez-en pour découvrir, si ce n'est déjà fait, les excellents albums de cet artiste.

    Le dernier paru en 2014 "Changing Places" :

    Et le premier "Missing Note" remarquable par ses ambiances :

     

     

     

     

  • Jim Putnam & Mickaël Mottet, Album éponyme, 2014.

    Dans la profusion des sorties de 2014, il y a cet album fruit d'une collaboration fructueuse entre Jim Putnam et Mickaël Mottet. Dix titres dont la moitié composée par chaque artiste et interprétée par l'autre.

    Des instants superbes tels "Down in the Ranks", "Let Be", "Concert of Everything", "Better Weather", "A List".

    De belles chansons portées par des voix différentes mais qui conviennent parfaitement à leur style.

    En écoute intégrale sur spotify :

  • Music review : Duo "Blanche as a name"

    Retenez bien le nom de ce duo formé par Bénédicte Monat et Sébastien Pasquet (TRISTEN, C++ et autres projets). Je l'ai découvert avec leur premier EP "Ravens" paru en 2012. Auteurs d'une reprise savoureuse et originale (ça change des imitations) de "Fais-moi mal, Johnny!", ils se révèlent encore plus avec leurs propres titres qui sont de petits bijoux parfaitement ciselés. Jeux de guitares, chants et chœurs parfaits, ambiances toutes en nuance et délicatement écrites telles le magnifique titre "Dove".

    On sent bien que ces deux-là dont les voix s'accordent merveilleusement, ont peaufiné tels des artisans leurs chansons à l'atmosphère parfois progressivement inquiétantes. Aucun titre à négliger de "Frost" et ses notes de guitare électrique à "Hear This" au son folk et aux magnifiques arrangements vocaux.

    En 2014, le duo a signé un deux titres chez Bleeding Gold Records. Les deux chansons "Ophelie" et "Judgment Day" confirment ce que je pensais d'eux. Je pense même qu'ils deviennent encore plus efficaces vocalement et musicalement.

    Il serait logique que la qualité atteinte aboutisse à la sortie d'un LP. Alors, faites connaître, partagez !

    Il est impensable qu'un groupe tel que celui-ci demeure confidentiel !

    L'ep "Ravens" (5 titres et 1 reprise) est en vente sur leur page bandcamp à un prix modeste alors, franchement, achetez-le parce que, quand ils seront connus et re-connus, vous aurez au moins le plaisir de vous dire tout doucement et discrètement que vous y aurez modestement contribué !

    Le double single est disponible chez Bleeding Gold Records.

  • My Favourite Albums : "Et après, on verra" by Lou, 2010.

    J'ai découvert Lou tardivement, un peu par hasard. Je ne connaissais rien de ses précédents albums. C'est sa prestation dans une émission de France 3 où elle était accompagnée de musiciens en parfaite osmose qui m'a littéralement aimanté. Cette alchimie parfaite entre musique, chant et texte.

    Je me suis alors empressé d'écouter et d'acheter cet album. Huit titres et des joyaux, des chansons si parfaites que l'on rêverait d'avoir le talent de les écrire et de les composer. Pour moi, Lou symbolise la grâce, l'élégance et la légèreté dans le paysage français musical, y compris lorsque les thèmes sont des plus graves, des plus mélancoliques, des plus sombres.

    L'album s'ouvre par la splendide « La prunelle des yeux » à l' écriture concise, limpide mais d'une rare force évocatrice :

    « J’ai eu du soleil

    Des démons et des merveilles

    Plein, la prunelle de mes yeux »

    « J’ai eu comme toutes les filles

    Des mains sur mes chevilles

    Qui font monter les larmes aux yeux »

    Et des chansons ciselées où chaque mot, chaque note est comme une évidence posée, comme inévitable, il y en a d'autres qui, parfois, vous plonge dans une mélancolie insondable. La somptueuse « Oceanic sentiment » :

    « Se rouler dans la terre humide

    Dans l’odeur de l’herbe coupée

    Se souvenir de l’amour vide

    Etre le seul à aimer »

     

    La magnifique «  Je n'ai rien fait » où la voix de Lou est encore plus fragile et troublante. « Tous les jours », « D'avril à juillet » et « La côte sauvage » s'enchaînent et, déjà, le dernier titre. Vingt-quatre secondes minimalistes de guitare électrique scandées de batterie légère et puis :

    « D’accord pour la vie

    D’ailleurs pour la mort aussi

    C’est plié, abandonné

    Sur la plage aux crustacés »

    Et « Plus rien », la chanson qui clôture l'album se poursuit, parfaite, magnifique, épurée, dans ses boucles lentes électriques pour s'achever par ces mots qui s'étirent :

    « Plus rien

    Plus de corps, plus d'écran

    Plus rien

    Dehors, dedans

    Plus rien »

     

     

    Mais l'écoute de Lou ne se résume ni au texte ni au chant. C'est aussi une expérience corporelle où le rythme de ses mots et de sa musique, son souffle, vient s'inscrire. Ses chansons me donnent une envie de bouger lentement, presque lascivement. Il y a une forme de sensualité presque paradoxale avec la teneur de son propos. Je ne sais rien du parcours artistique de cette artiste mais je trouve qu'il y a quelque chose de l'ordre du mouvement, de la danse dans la maîtrise de la durée, de l'ondulation, de l'oscillation lente.

    Loin d'une apparente simplicité, le miracle des compositions de cet album est de provoquer une sensation de coulé, d'ondoiement, de mouvement épuré, de fragile retenue. Peu d'albums provoquent de telles sensations.

    Simple amateur de musiques, je ne maîtrise ni le vocabulaire ni les codes de la critique et encore moins les subtilités des références musicales. Mais il me semble que Lou trace une voie originale dans la chanson pop française. Un quatrième album serait en préparation. Je l'attends avec impatience.

    Les trois albums de Lou sont en écoute et disponibles sur sa page bandcamp. Ne vous en privez surtout pas.